MONTREUX
a mal à sa culture
par Antonin Scherrer
L'auditorium Stravinski
Le Montreux Voice & Music Festival n'est plus. Et après? Toutes les histoires ont une fin, vous diront les philosophes. Certaines sont simplement plus rugueuses que d'autres. Ainsi celle de la manifestation vaudoise, marquée du sceau de la confusion et de l'étonnement dans une large frange du public. «Impensable!» était l'adjectif qui courait sur toutes les lèvres au lendemain de l'annonce de sa disparition. Pensez! Une manifestation vieille de plus de cinquante ans, fréquentée par les plus grands depuis la fin de la guerre, cela ne peut pas s'arrêter ainsi, aussi subitement, aussi... tristement. Et pourtant.
On connaissait les problèmes financiers de la manifestation, épongés ces dernières années par des sponsors et des mécènes bienveillants. On connaissait aussi le très faible engagement des collectivités publiques dans le budget global -- un maigre 10% dans les meilleures années: une bagatelle par rapport à d'autres manifestations du genre. Et finalement cette séance du Conseil communal de Montreux, le 27 février dernier, portant le coup de grâce, en refusant catégoriquement un subside extraordinaire de 500'000 francs qui aurait permis, selon le Conseil de Fondation d'alors, de «donner le dernier coup de pouce à la restauration de ses finances».
A chaud, les réactions se déchaînent. De l'amertume à l'indifférence, chacun y va de son petit avis. Les échauffourées éclatent, s'étalent jusque dans la presse, certains profitant du chaos pour régler des comptes personnels. La grande question est: la faillite du festival était-elle prévisible? Ou, dit différemment, qu'est-ce qui fait qu'une manifestation au destin parallèle comme le Festival de Lucerne tienne le coup, alors que Montreux doit aujourd'hui jeter l'éponge? Sans entrer dans les détails -- car le sujet est une véritable fourmilière de micro-polémiques -- nous avons tenté de rassembler quelques avis sur la question.
Le tournant de 1997
Il est un fait que personne ne contestera: l'arrivée en 1997 de Christian Chorier à la tête de la manifestation, coïncide avec un remaniement programmatique en profondeur. Du festival essentiellement symphonique, contrepointé par quelques épisodes veveysans (fort appréciés) de musique de chambre, on passait sans transition à un festival résolument dans «l'air du temps» -- une expression relayée par plusieurs commentateurs spécialisés -- centré sur la voix et les instruments d'époque. Ses deux prédécesseurs, René Klopfenstein et Yves Petit de Voize, avaient certes anticipé le mouvement, en instituant notamment quelques étapes de musique ancienne au Château de Chillon; mais c'en était resté au stade de l'anecdote...
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