No. 61/2    juin 2008

 

Cinq entretiens inédits de Jane Bathori
avec Stéphane Audel (1953)

rmsr

Présentés et annotés par Malou Haine, chercheur associé à l'IRPMF, professeur à l'Université Libre de Bruxelles, conservateur du Musée des Instruments de Musique de Bruxelles

 

Jane Bathori (1877-1970)

Le nom de Jane Bathori reste avant tout attaché à l'avant-garde musicale française, que ce soit celle du début du siècle, avec Fauré, Debussy et Ravel, ou celle de l'après-guerre avec le Groupe des Six. Elle fréquente la plupart de ces compositeurs dont elle crée de nombreuses mélodies.

De son vrai nom Jeanne-Marie Berthier, cette soprano française étudie très tôt le piano, d'abord sur un piano carré Pape dès l'âge de cinq ans, puis à dix ans avec le professeur Hortense Parent. A 19 ans, alors qu'elle aurait pu devenir une pianiste professionnelle -- ce qui lui permettra de s'accompagner elle-même lors de ses récitals de mélodies -- elle se tourne vers le chant qu'elle apprend avec Mme Brunet-Lafleur. Cette dernière lui choisit son pseudonyme lors de ses débuts en 1898 au Théâtre de la Bodinière, à la demande du poète Achille Ségard. Jane Bathori chante des mélodies sur des poèmes de Verlaine dans un festival Reynaldo Hahn, accompagnée du compositeur au piano. Elle y rencontre le ténor Emile Engel qui devient son professeur, puis dix ans plus tard son mari dont elle divorcera en 1921. En 1898, elle chante également aux Concerts du Conservatoire où elle fait la connaissance de Maurice Ravel.

Entrée en contact avec Emmanuel Chabrier, elle interprète ses mélodies alors peu jouées. Très vite, elle prend goût à chanter Gounod, Duparc, Chausson, Roussel, etc. Pendant les trois saisons qui suivent l'année 1900, Jane Bathori se produit sur les scènes lyriques de Nantes, Milan et Bruxelles. Trois ans plus tard, Octave Maus l'engage à plusieurs reprises dans les concerts de La Libre Esthétique où elle donne, entre autres, la première belge des Chansons de Bilitis. Bathori abandonne le théâtre pour les concerts. Son interprétation en 1904 de la mélodie Asie extraite du cycle Schéhérazade de Ravel lui vaut d'assurer ensuite la création de presque toutes les premières mélodies de ce compositeur.

La soprano devient rapidement l'une des cantatrices les plus renommées des mélodies françaises de son époque qu'elle déchiffre avec une réelle aisance. Durant la guerre, le couple Bathori-Engel reçoit chez lui, boulevard Pereire, le dimanche soir, des musiciens, écrivains et artistes. On déchiffre abondamment les partitions et si les oeuvres comportent des parties chorales, tous les musiciens présents y participent (notamment Ravel, André Caplet, Ricardo Viñes, Charles Koechlin et Darius Milhaud). En l'absence de Jacques Copeau parti au Garrick Theater de New York à la fin du mois d'octobre 1917 pour y diriger le Théâtre-français à l'invitation du mécène Otto Kahn, Jane Bathori se voit confier l'exploitation du Théâtre du Vieux-Colombier. Avec son mari Emile Engel, elle avait déjà précédemment utilisé ce lieu, de novembre 1911 à avril 1912, pour y donner une série de dix séances sur «La musique à travers les poètes et les âges» qui avaient suscité un intérêt certain.

La direction du Vieux-Colombier va permettre à Jane Bathori de prendre place parmi les personnalités en vue de la vie artistique parisienne. Elle va promouvoir cet «Esprit nouveau» qui anime les jeunes poètes et musiciens en leur offrant de nombreuses premières auditions. Gaston Gallimard, administrateur-délégué de la Société du Théâtre du Vieux-Colombier, signe avec Jane Bathori le 28 septembre 1917 le contrat de location qui l'autorise à disposer du Théâtre du Vieux-Colombier pour la saison du 1er novembre 1917 au 1er juin 1918. Elle peut y donner des représentations musicales ou poétiques, tant en soirées qu'en matinées. Les locaux lui sont offerts pour la somme correspondant aux charges, prime d'assurance, contribution et impôt d'exploitation. En clair, il n'y a aucune location proprement dite, mais elle doit assurer les frais d'exploitation. Chaque semaine, il y aura en général trois séances, dont l'une consacrée aux oeuvres d'avant-garde.

Lors de la séance d'adieu donnée pour le départ de Copeau, Bathori montre déjà ses goûts prononcés pour les oeuvres contemporaines: les Trois Chansons pour choeur mixte de Ravel sont chantées pour la première fois...

 

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