No. 63/3    septembre 2010

 

Livres

Liszt et Wagner, nouveautés et rééditions

Par Vincent Arlettaz

Dictionnaire Wager, Actes Sud

Timothée Picard (éd.): Dictionnaire encyclopédique Wagner, s.l., Actes-Sud–Cité de la Musique, 2010, 2494 p., bibl.

Serge Gut : •  Franz Liszt, les éléments du langage musical, deuxième édition revue et augmentée, préface de Jacques Chailley, s.l., Zurfluh, 2008, 376 p., ex. mus., bibl., index •  Franz Liszt, Sinzig, Studio, 2009, 918 p., ex. mus., bibl., index, catalogue des œuvres

 

Un genre nouveau, encore inconnu il y a quelques années, semble aujourd'hui en passe de devenir à la mode: le dictionnaire sur une individualité. Le Dictionnaire Berlioz, paru en 2003 à l'occasion du bicentenaire de la naissance du compositeur français, fut apparemment le premier de son espèce dans notre langue. Berlioz et Wagner se regardant en chiens de faïence depuis 170 ans, ce dernier ne pouvait décemment être en reste. Chose faite depuis le début de cette année! Il est bien évident que l'auteur de la Tétralogie n'aurait pu se contenter d'être expédié en un volume maigrelet: le Dictionnaire Encyclopédique Wagner paru sous la direction de Timothée Picard chez Actes Sud, comporte pas moins de 2'500 pages, pour la plupart fort instructives. Plus qu'aucun autre musicien, et même plus qu'aucun autre artiste, Wagner a suscité une littérature très abondante, souvent très verbeuse aussi; c'est donc avec un certain soulagement qu'on prend connaissance d'une telle publication: les articles vont généralement droit au but, et la démarche est menée avec une honnêteté intellectuelle suffisamment rare pour être relevée (voir l'article Antisémitisme par exemple). Les omissions, rares, sont toutefois spectaculaires (Accord de Tristan ou Dissonance, tous deux introuvables!), et la tournure générale de l'ouvrage -- sans grande surprise -- est littéraire et philosophique plutôt que technique (Chromatisme: 2 pages, Harmonie: 4 pages, à comparer aux 20 pages de France); le volume ne comporte même aucun exemple musical, ce qui est tout de même un comble! Si certains lemmes tombent sous le sens, comme Liszt, Baudelaire, Leitmotiv ou Graal, d'autres sont plus abstraits, parfois même plus difficiles à isoler, ce qui tend à tempérer l'avantage de maniabilité et d'accessibilité de l'information -- voir: Responsabilité; Völkisch; Médiocre (imaginaire); ou encore: Ecrire Wagner? (comment). Objectivement, un dictionnaire, fût-il encyclopédique, ne peut envisager de se substituer à un ouvrage de référence, encore moins à une série d'ouvrages; les genres ne doivent pas être confondus. Le défaut majeur du dictionnaire, à savoir la quasi impossibilité de fournir des références, est en effet rédhibitoire -- à moins que l'on accepte d'en réformer fondamentalement la conception, ce qui semble de plus en plus inévitable; dès lors, les notes de bas de page et les bibliographies spécifiques sont appelées à y devenir aussi systématiques que dans les articles de revues ou les monographies. Dans le cas particulier du Dictionnaire Encyclopédique Wagner, la question est d'autant plus dramatique que la seule bibliographie disponible est donnée en toute fin d'ouvrage. 2'500 pages de texte sans aucune référence, c'est un peu comme si l'on nous donnait à voir un musée de peinture sans noms d'auteurs, sans dates et sans aucun certificat d'authenticité; la question est sérieuse...

 

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Revue Musicale de Suisse Romande septembre 2010

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(page mise à jour le 23 septembre 2010)