Le Grand Théâtre s'affiche
par Claudio Poloni
Affiche pour le Grand Théâtre de Genève, par Roland Aeschlimann, 1977
Le Grand Théâtre et la Bibliothèque Musicale de la Ville de Genève se sont associés pour présenter -- du 25 mars au 27 mai 2011 -- une exposition d'affiches de l'ancien Théâtre de Neuve, devenu aujourd'hui Grand Théâtre. Le public a ainsi eu l'occasion unique de visualiser d'un seul coup d'oeil l'évolution des affiches lyriques dans la ville du bout du lac, sur une période de près de 250 ans.
C'est peut-être une lapalissade, mais un monde sépare les placards les plus anciens, datant du milieu du XVIIIe siècle, des affiches les plus récentes. Un peu moins d'une centaine d'affiches étaient visibles, non seulement à la Bibliothèque Musicale et au Grand Théâtre, mais aussi au Café du Grütli tout proche.
La collection d'affiches du Grand Théâtre de Genève compte actuellement quelque trois mille pièces. Celles qui sont antérieures à la réouverture du Théâtre en 1962 sont conservées à la Bibliothèque Musicale, alors que les plus récentes sont gardées dans les locaux du Grand Théâtre. Pour mesurer le caractère extraordinaire de cette collection, il faut avoir présent à l'esprit que les affiches sont, par nature, éphémères. Au XIXe siècle en effet, l'affiche était posée le jour même de la représentation, pour être ensuite recouverte par d'autres le lendemain. Sans compter les incendies et autres déménagements qui ont eu raison de nombreux exemplaires restants. Les premiers placards sont exclusivement typographiques: un texte annonce le spectacle, avec force détails (par exemple le nombre de représentations, les titres de chaque acte, voire de chaque air ou encore le succès rencontré), sans oublier bien sûr la distribution. Ce modèle est encore en vigueur aujourd'hui dans de grandes maisons d'opéras, par exemple à la Scala de Milan ou à Vienne.
Dès les années 1890, des images font leur apparition sur les affiches. Elles témoignent d'une grande variété d'approches: reproduction plus ou moins fidèle d'un élément ou d'un décor de l'oeuvre annoncée, ou encore interprétation symbolique. Avec le temps, l'image prend de plus en plus d'importance -- l'objectif premier est d'attirer immédiatement le regard -- pour réduire le texte à la portion congrue. L'affiche devient nettement plus ambitieuse. Depuis de nombreuses années maintenant, le Grand Théâtre travaille avec des graphistes renommés, parmi lesquels il faut citer Roland Aeschlimann (qui a aussi revêtu la casquette de metteur en scène au Grand Théâtre, on se souvient en effet de sa vision de Parsifal) et Roger Pfund, à l'origine des affiches de plusieurs saisons au début des années 2000.
Les affiches témoignent également de l'évolution de la programmation. Au départ, les oeuvres présentées sont fortement liées au goût français. Les soirées débutent souvent par un vaudeville, avant un grand opéra-comique. Puis apparaît le répertoire allemand, avec la création à Genève des opéras de Wagner. Quoi qu'il en soit, l'exposition a mis en valeur des affiches liées soit à des ouvrages essentiels du répertoire, soit à des moments-clés de l'histoire du Grand Théâtre...
(www.ville-ge.ch/bmus)
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