No. 66/2    juin 2013

 

Opéra de Lausanne

Le retour de l'Aiglon

Par Myriam Tétaz-Gramegna

Carine Séchaye

La mezzo-soprano genevoise Carine Séchaye, impériale dans le rôle-titre de l'Aiglon. © Marc Vanappelghem

 

«L'Aiglon» d'Edmond Rostand (1900) raconte les malheurs du fils unique de Napoléon et de l'archiduchesse Marie-Louise d'Autriche, élevé à la cour de Vienne et mort de tuberculose en 1832, à l'âge de 21 ans. Brodant sur des faits réels (mais historiquement mineurs), la pièce de l'auteur de «Cyrano» se veut surtout une réflexion sur le patriotisme, l'honneur ou encore le cynisme. Une quarantaine d'années plus tard, elle fut mise en musique, et -- chose originale -- ce furent deux compositeurs qui s'en chargèrent conjointement: Arthur Honegger et Jacques Ibert. (réd.)

 

C'était une première à Lausanne, qui a fait l'événement: pourtant L'Aiglon de Jacques Ibert et Arthur Honegger, d'après la pièce d'Edmond Rostand, semblait une partition oubliée. Créé à Monte-Carlo en 1937, il avait été donné à Genève en 1953, mais c'est à l'Opéra de Marseille, dirigé alors par Renée Auphan, qu'Eric Vigié l'a vu (en 2004), se promettant de le monter à son tour. L'ouvrage était à l'affiche de l'Opéra de Lausanne en avril dernier, dans la mise en scène marseillaise de Patrice Caurier et Moshe Leiser, conduite à Lausanne par Renée Auphan qui retrouvait ainsi la maison dont elle avait été la directrice de 1983 à 1995.

 

Une partition à quatre mains

Ce retour de l'Aiglon a convaincu. L'extraordinaire est certainement l'unité de l'opéra alors qu'il a été écrit par deux compositeurs, amis il est vrai, mais aux tempéraments différents. On connaît l'anecdote, racontée par Honegger: «Nous avions eu une panne, et je laissais tourner le moteur un moment avant de démarrer. A ce moment je t'ai dit que Henri Cain (le librettiste) me demandait d'écrire une partition pour l'Aiglon. Tu m'as répondu, avec un sursaut qui faillit compromettre à jamais les ressorts du siège avant, que tu avais été l'objet d'une semblable sollicitation.» Ibert et Honegger décident alors qu'ils écriront la partition ensemble, avec la ferme intention d'en faire un opéra «simple, accessible à tous», une oeuvre grand public. Ils prétendaient garder secret quelle avait été la part de chacun, mais il apparut très vite que les actes I et V, ainsi que le ballet du IIIe acte, étaient de la plume d'Ibert, tandis qu'Honegger signait les actes II, III (pour l'essentiel) et IV -- en particulier le monologue machiavélique de Metternich à l'encontre du fils de Napoléon, et surtout la scène hallucinante où l'Aiglon en fuite, tandis que meurt son fidèle grognard Flambeau, revit en rêve, dans une fulgurance impressionnante, la terrible bataille de Wagram. Ce que confirment les pages manuscrites conservées par la fille du compositeur, Pascale Honnegger, au demeurant filleule de Jacques Ibert. On y voit que le papier à musique et la calligraphie sont propres à chacun, donc facilement reconnaissables. Quant à l'histoire, c'est celle du fils de Napoléon qui rêve d'une France conquérante et révolutionnaire, où il serait le successeur de son père. Descendant des Habsbourg par sa mère, la seconde femme de Napoléon, il vit à Vienne auprès de son grand-père l'Empereur François Ier, écrasé par la figure du héros vénéré, déchiré entre doute et ambition...

 

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RMSR juin 2013

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(page mise à jour le 5 juillet 2013)