No. 63/1    mars 2010

Epilogue

épilogue

Par le hublot, mon regard se perd dans les vastes étendues de Sibérie Orientale; au milieu de nulle part, des fleuves égarés serpentent entre des collines rocheuses couvertes de neige. Sentiment étrange: chaque quart d'heure, j'ai l'impression que c'est un paysage entièrement nouveau qui se déroule au-dessous de moi. L'ordinateur sur les genoux, j'ai commencé à mettre en page quelques-unes des photos prises pendant mon reportage; je me plais déjà à imaginer la couverture, qui reproduira une de ces estampes exquises. Je repense aux jours qui viennent de s'écouler; je repense aux rencontres, aux rires; aux couleurs du kabuki, aux arpèges chatoyants du koto ou aux plaintes inconsolables du shakuhachi. Je repense surtout à l'accent de mélancolie avec lequel tous mes interlocuteurs se sont exprimés, conscients sans doute d'être nés trop tard, dans un monde trop moderne... Pourtant, la tradition n'est pas morte; on peut même supposer qu'elle acquiert, lentement, patiemment, un rayonnement qu'elle n'avait jamais connu. Après 150 ans d'efforts conscients ou inconscients faits pour l'éradiquer, la flamme de la passion brille encore dans les yeux des musiciens; à aucun instant, je n'ai eu l'impression de me trouver face à des morceaux de folklore sans vie. A bien y réfléchir, c'est là un gage d'espoir immense.

J'entends encore les mots de John Kaizan Neptune: «Quand je suis arrivé au Japon», me confiait-il, «j'avais l'ambition de faire quelque chose pour sauver un peu de cette culture, de cette musique, avant qu'il ne soit trop tard. Aujourd'hui, j'ai compris que la musique japonaise n'a pas besoin de moi. Cette tradition ne va pas mourir, elle se perpétue, à sa manière, en marge de tout.» Plusieurs leçons peuvent néanmoins être tirées de tant d'observations. Tout d'abord, il paraît clair que la voie de l'isolement est stérile. Autant que l'armée des samouraïs, la culture japonaise avait été en fait terriblement fragilisée par l'absence de contacts avec le monde extérieur; au moment où l'ouverture est devenue inévitable, sa sublime solitude en avait fait une victime facile pour la globalisation, de la même manière qu'un système immunitaire qui n'est jamais sollicité succombe au premier virus venu. Comme l'être humain lui-même, une culture se nourrit d'échanges; il en a été ainsi pour toutes les civilisations; et l'époque Edo elle-même n'échappe pas à cette règle, elle qui peut être vue en somme comme une longue coda sur le thème des influences chinoises et coréennes...

 

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RMSR mars 2010

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(page mise à jour le 30 mars 2010)