No. 68/4    décembre 2015

 

Chaos et harmonie

Editorial

Vincent Arlettaz

par Vincent Arlettaz

 

Pour une grande partie des Suisses romands, Dijon est avant tout une gare, traversée par le TGV qui les amène à Paris... Peu d'entre eux pensent à s'y arrêter, quand bien même, pour la plupart, ils se sont enthousiasmés à la visite des Hospices de Beaune, de la Basilique de Vézelay ou des caves de la Côte-d'Or. C'est fort dommage: car la capitale de la Bourgogne, avec ses petites places pavées, ses hôtels particuliers et son fabuleux musée d'art médiéval, mérite assurément plus d'une halte. Pour les musiciens, Dijon a encore au moins un autre attrait, considérable: c'est ici que se trouve en effet le berceau de la famille de Jean-Philippe Rameau, un des plus grands compositeurs de son temps -- et sans doute le plus génial théoricien de l'harmonie qui ait jamais vécu. Certes, tôt parti pour Lyon, Clermont-Ferrand puis Paris, l'auteur de Dardanus ne terminera pas sa carrière dans sa Bourgogne natale. Ses attaches familiales étaient puissantes néanmoins; et celles-ci éclairent de manière unique le profil personnel de l'artiste.

On savait Jean-Philippe Rameau pourvu d'un très fort caractère. Son avarice était proverbiale: au point de mourir immensément riche après avoir, paraît-il, obstinément refusé d'accorder une dot à sa propre fille cadette! Il rejoint ainsi un club d'artistes pingres ma foi fort bien fréquenté, puisqu'on y trouvera également un William Turner ou un Charlie Chaplin. D'ailleurs, l'illustre compositeur n'avait fait en cela que reprendre les marottes de son propre père, Jean Rameau, également organiste. Si nous remontons encore une ou deux générations, nous trouverons des orphelins, des savetiers et des cultivateurs ballotés par la misère. Le jeu, l'alcool sans doute aussi, appartenaient au paysage; de même que les insultes, voire les coups et blessures. Les documents d'archives présentés ici par Erik Kocevar (p.18) sont exceptionnels, car ils nous permettent d'entrer dans l'intimité d'une famille d'artistes de l'Ancien Régime, âpres au gain, colériques, voire brutaux. Il est piquant de voir que c'est de cette tourbe que s'élèvera l'harmonie la plus sublime. Retirons-en un message d'espoir: la violence n'est pas l'invention de notre époque. Serons-nous capables nous aussi de transformer le chaos en or?

 

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RMSR décembre 2015

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